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mardi 16 mai 2017

IMAGINALES

Comme chaque année, j'ai le plaisir d'être invitée aux Imaginales d'Epinal, THE place to be quand on aime les littératures de l'imaginaire, la fantasy en particulier.


 Pour voir les conférences et tables rondes auxquelles je participe durant ces 4 jours, il suffit de cliquer sur ce lien!


Enfin, je vous propose ci-dessous un court extrait de mon prochain roman de fantasy, à paraître en 2018 chez Mnemos.



Dans l’antique royaume de Simbwan, avant que l’Asag n’empoisonne  les rivières et le sol, la magie nichait partout, dans le minéral et dans le vivant car, disait-on, c’était le royaume favori d’Azara. Les djinns allaient aux côtés des hommes, en ces temps reculés, bien plus souvent qu’aujourd’hui et la Déesse elle-même aimait à se promener sur cette terre fertile. Un musicien, Senwou, tomba amoureux de l’un de ces immortels à la beauté poignante, un amour sans espoir car celui qu’il aimait ne savait même pas son existence. Senwou était aimé, lui aussi, par une antilope avec laquelle il avait grandi. Turqi ne parlait pas, mais n’avait nul besoin de voix pour être comprise. Son attachement pour Senwou était tel qu’elle n’avait jamais voulu goûter aux délices de la vie sauvage et le suivait en tous lieux. Pour Turqi, Senwou était tout. Et quand elle le vit jour après jour s’étioler, délaissant son inanga, oubliant de manger, incapable de dormir, l’animal décida de prendre en elle un peu de son chagrin. Elle se coucha à ses côtés, et cette nuit-là, Senwou put se reposer. Au matin, l’antilope tremblait sur ses pattes, se montrait abattue mais demeura bravement auprès de lui. Senwou se rendit au bord de l’oued où son aimé avait coutume de se promener. Il imaginait que le djinn s’arrêterait pour écouter sa musique, mais celui-ci ne lui accorda pas un regard. Senwou regagna sa case, accablé. À force de pleurer, il tomba malade. Et Turqi, une fois encore, se coucha auprès de lui. Et Turqi, une fois encore, prit un peu de son chagrin et de sa maladie. Et les semaines passèrent. Senwou, amoureux, malheureux, composait pour le bel indifférent des airs que ce dernier semblait ne pas même entendre. Mais il espérait encore. Et l’antilope dépérissait.  Son poil devenait terne, ses côtes saillaient sous sa peau. Elle tenait bon, pourtant et ne renonçait pas à son vœu. Un matin plus frais que les autres, Senwou décida de jouer sa plus belle chanson pour le djinn, une chanson dans laquelle il avait mis son amour, sa passion. Enfin, celui-ci s’approcha de lui et sourit. Une onde de joie traversa le jeune homme. Libéré de son tourment, il put de nouveau écouter, sentir, voir. Alors, il découvrit l’état de son amie. Mais il était trop tard pour la guérir. Le mal qui la dévorait, né de son dévouement, avait raison de ses dernières forces. « Quand je mourrai, lui dit-elle de ses grands yeux liquides, déjà voilés par la mort, tu prendras mon cœur et tu le garderas avec toi. Il te portera bonheur. » Et Turqi rendit son dernier souffle. En larmes, Senwou ouvrit la poitrine de son amie, prit son cœur encore brûlant. Au moment même où les rayons du soleil tombèrent sur lui, l’organe se métamorphosa en pierre. Une pierre bleue clair, tiède dans la paume de l’humain. On dit qu’elle lui porta bonheur, que le djinn dont il était épris, touché par son histoire, en fit un poème. On dit aussi que lorsqu’on trouve une turquoise, il faut la garder précieusement contre son cœur et la traiter avec soin, car elle est née d’un sacrifice. 
 


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